Le putto

À la veille de l’élection du conseil fédéral par les chambres éponymes et le remplacement du siège de messire Schmid, les intellectuels émérites du libre pensage, les chantres bêlants du néo-conservatisme, les thuriféraires de la droite décomplexée   y vont de leur petit couplet pour nous faire passer le père Ueli pour un brave paysan compétent, un homme qui sous des dehors un rien fruste cache une grande intelligence, un juste parmi les justes, un putto angélique et baroque.

Le surévalué Pascal Décaillet, après deux semaines de silence, nous livre deux fois la même analyse, à peine remaniée. Il ne se la foule pas trop, le Pascal. Il nous avait déjà fait le coup pour l’affaire connue sous le nom du « petit chanoine teigneux », nous servant l’argument abscons du « journal de droite » pour justifier une émission de radio, un  article sur son blog et un édito dans le Nouvelliste. Je pense qu’il doit être fatigué, l’analyste préféré des ménagères de moins de cinquante ans. En plus du sempiternel refrain contre les élites incapables selon lui de s’adresser et de comprendre le peuple souverain, en plus d’entretenir dans ce style ampoulé qui lui est propre, la haine sans fin qu’a le pékin de base pour tout ce qu’il juge un tant soit peu intellectuel, et en plus de glorifier une fois encore les goûts simples de la vie paysanne, les plaçant comme une panacée face à la vie dépravée et cosmopolite des citadins,  le voilà qui se livre sans aucune retenue à un éloge plus que flatteur du maître suprême, du gourou omniscient, le « héros » (sic) Christoph dans le but à peine voilé de faire passer l’outsider Maurer pour un homme bien sous tous rapports (c’est bien entendu une image). Il ne se rend pas compte que, servilement occupé à lécher la raie du tribun zurichois, il ridiculise, minimise et piétine carrément   les optionnelles qualités  de ce pauvre paysan d’Ueli, qualifié même de « Canada Dry ». Alors Pascal, sache-le, ce n’est pas pour une question de style que les parlementaires fédéraux hésitent à élire le succédané à la plus haute charge de l’état, c’est tout simplement, comme tu l’as si bien écrit, qu’il n’a pas les capacités, ce plouc.

Heureusement, son compagnon de travée avec lequel il partage l’hostie le dimanche matin à Champlan, Vincent Pellegrini, vient en aide au candidat agrarien dans un magnifique article le décrivant comme un saint homme capable de tous les sacrifices afin que croissent, même au milieu du lisier, les fleurs de la fraternité et de la solidarité. Un véritable homme de Dieu, un chrétien pur sucre (à défaut d’être catholique) qui sacrifie son existence besogneuse à l’épanouissement de ses enfants. De tous ses enfants car selon lui, attention, ouvrez les guillemets : « Les membres les plus faibles de la société sont les enfants et la chose la plus importante dans cette société est de leur donner de l’amour. Avec les enfants, on vit des choses beaucoup plus riches que dans le monde professionnel. » Et Vincent de nous rapporter ces propos en écrasant une larme sur tant de bonté. Ce qu’il a sans doute oublié ce brave théophile, c’est que selon les idées assez fermées de l’UDC, les enfants auxquels notre société se doit de donner tant d’amour doivent de préférence être Suisses ou alors chrétiens, intégrés, blancs, gentils et surtout bien le mériter. Si l’on considère, comme ces bons chrétiens du parti à Christoph, que seul les meilleurs ou les bien-nés sont digne d’amour, d’une part on réduit de beaucoup la dose de pitié à distribuer  et  de plus on s’éloigne un tout petit peu d’un Dieu qui, si mes souvenirs de catéchisme sont exacts, aime ses enfants sans distinction. Faire passer le loup pour le bon pasteur c’était bien essayé, Vincent, mais faudrait pas non plus nous prendre pour des cons.

Maintenant, anussophages, sortez de ma chambre !

Alcazard

2 commentaires pour “Le putto”

  1. sardinaluileNo Gravatar dit :

    Les ménagères de moins de cinquante ans c’est ta prose qu’elles préfèrent, Alcazard ! C’est certainement pour ça que Pascal t’en veut.

  2. AlcazardNo Gravatar dit :

    Merci