Quand Yves fait de la géopolitique…

Du temps où il travaillait comme journaliste  au « Washington Times », le journal de la secte Moon, Yves Nidegger en a gardé quelques vieilles habitudes. Premièrement, celle d’écrire  avec un style à l’américaine. Les personnes bienveillantes pourront comparer sa prose brève, coupée, nerveuse et épurée à celle de  l’immense Cormac Mc Carthy. Les mauvaises langues répliqueront que l’auteur de « La route » et de « No Country for Old Men » emploie délibérément ce style afin de renforcer l’image d’un monde proche du néant que ses romans décrivent et que l’écriture de Nidegger relève plutôt d’une mauvaise connaissance des codes grammaticaux et stylistiques francophones. Pourtant, il me semblait que même dans le canton de Genève où l’école est tant décriée, les élèves de primaire apprennent le classique  usage de la formule « sujet – verbe – COD ( ou COI) » qui semble faire défaut au conseiller national UDC.  Ça doit donc être intentionnellement voulu et nous ne pouvons que nous féliciter de cette simplification dans la manière d’écrire la langue française. Reste à savoir si ça va plaire à Maître Bonnant…

Yves Nidegger a également gardé une autre habitude du journal de la droite extrême américaine : celle qui consiste à élaborer des analyses alambiquées et réductrices. Il le démontre encore une fois dans le billet de l’invité du Nouvelliste du jour où il s’essaie à quelques vagues considérations géopolitiques.

Passons sur le premier paragraphe où le conseiller national UDC tente, à l’instar de nombreux camarades de parti, d’imputer  la crise financière à la gauche politique. Faire des subprimes un reliquat de gauche et critiquer le « tout économique » quand on est membre de l’UDC est évidement douteux intellectuellement. Mais ça nous permet d’espérer l’écriture d’un article futur sur les compromissions politico-économiques entre le POP vaudois, Martin Ebener et Marcel Ospel.

Mais attaquons nous plutôt à la substantifique moelle de l’article. Les prémisses du discours de Nidegger se basent, comme il l’explique, sur l’idée de choc des civilisations qu’il reprend à Samuel Huntington. Il s’agit évidemment de théories simplistes et manichéennes qui  zappent la complexité du monde, les contingences historiques et le rapport à l’altérité.  Surtout que cela lui permet de remettre en cause le  principe d’universalité (des droits humains) cher à l’ONU. Remise en cause d’ailleurs partagée par tous les intégristes et dictateurs de la planète afin d’assouvir leur pouvoir au nom d’un « droit à la différence »  opposé à l’universalisme  et qui n’est que paravent face à l’injustice.   Par contre on ne peut  que donner raison à Nidegger en affirmant que le monde est dans une phase de multipolarité croissante qui succède à une phase d’impérialisme américain et cela sans tomber dans une analyse civilisationelle à la Huntington.

Nidegger part donc de cette analyse pour imaginer le rôle de la Suisse dans ce monde multipolaire .  La Suisse devrait, selon lui, adopter un rôle d’État neutre  envers les divers blocs en offrant des services  et  des prestations aux divers protagonistes mondiaux. Il s’appuie sur l’histoire pour étayer son hypothèse de Suisse indépendante et neutre résistant aux tristes aléas de l’histoire mondiale. Y sont cités divers épisodes comme le traité de Vienne reconnaissant la neutralité helvétique « dans l’intérêt de l’Europe entière« .

C’est une vision idéalisée  et mythique de l’histoire suisse. Si notre pays a eu un rôle privilégié, c’est surtout dû à des facteurs conjoncturels et historiques. Par exemple, si, en 1815, au traité de Vienne, la neutralité suisse a été reconnue, c’est bien pour une raison : il fallait  un état non belliqueux envers ses voisins qui puisse jouer le rôle de tampon entre la France et l’Empire austro-hongrois. Le rôle de la Suisse en tant qu’entremetteuse de bons offices a  toujours été tenu parce que les puissances européennes l’ont bien voulu. Mais l’affaire des fonds juifs dans les années 1990 a bien montré que ce rôle de la Suisse avait changé et que notre pays n’était plus un îlot protégé grâce à son attitude dans la lutte contre le communisme.

Yves Nidegger affirme donc  que la Suisse doit « offrir des prestations conformes à sa vocation. C’est-à-dire utiles à tous. Et qu’aucun autre acteur de la scène internationale ne sera en mesure de fournir. » Idéalement ça serait merveilleux.  Mais c’est ignorer que le choix de l’Alleingang et une certaine suffisance ont fait perdre beaucoup de crédit à la Suisse face aux autres pays européens.  Et ne parlons pas des rapports avec le reste du monde.  Les politiques restrictives envers les étrangers ou la volonté de s’en prendre à des croyances religieuses en voulant interdire la construction de minarets ont  écorné l’image de la Suisse à travers le monde. Suffisamment, en tous les cas, pour qu’on veuille bien se passer de nous et de nos bons offices à l’avenir. Le temps (pas le journal) nous le dira.

L’UDC  défend ces politiques de fermeture et de repli et  voudrait encore que le reste du monde nous adore et demande nos services. C’est bien ce qui s’appelle vouloir le beurre, l’argent du beurre et le cul de la crémière…

Fernand qui préfère la margarine

7 commentaires pour “Quand Yves fait de la géopolitique…”

  1. BrigitteNo Gravatar dit :

    Vous avez réussi à lire cette prose décousue jusqu’au bout ? Alors là, chapeau. Un jeune qui écrirait comme ça n’aurait jamais la moyenne en rédaction. Même en 2e primaire. J’ai essayé de lire ce matin. Pas réussi. Dommage. Exercice pas réussi. Stop. NF.

  2. ythetazNo Gravatar dit :

    « Ça doit donc être intentionnellement voulu »… Hum!

  3. OrgelNo Gravatar dit :

    Ben voyons, Nidegger. On appréciera la formule qui veut que la Suisse ait échappé à l’occupation en vertu du traité de 1815, au nom d’une neutralité reconnue utile pour l’Europe entière. Cette vision des faits historiques est aberrante, car elle suppose un respect des lois internationales par l’Allemagne nazie. La Belgique aussi était neutre, je crois, ce qui a beaucoup fait rire les panzers.
    « … la Suisse offrira aux blocs rivaux des prestations conformes à sa vocation. » dit encore le cher garçon. Ah bien oui. Cela me fait penser à l’épouvantable loi américaine de 1939, « Cash and Carry », qui autorisait la vente d’armes aux bélligérants (à condition qu’ils paient cash et qu’ils viennent les chercher).
    Alors oui, vraiment, la Suisse pourra continuer à vivre heureuse. Alleluia!

  4. CroquignolNo Gravatar dit :

    Il pourrait au moins citer ses sources historiques. A mon avis, ça doit être « Histoire générale de 1789 à nos jours » de Chevallaz. Un superbe bouquin d’ailleurs. En primaire, il m’a appris que les Américains avaient parqué les Indiens dans des réserves parce que ces derniers étaient alcooliques. Sans oublier, l’Allemagne nazie n’osant pas attaquer la puissante armée suisse. Par contre, aujourd’hui ce livre me fait beaucoup rigoler.

  5. IlitchNo Gravatar dit :

    Pour info, les élèves n’apprennent plus la nuance entre le COI et COD à Genève. Ces derniers apprennent; sujet, verbe, « comp. d’objet du verbe » Certains diront que ce n’est pas si grave, et d’autres (Me Bonnant) diront que cela est déplorable….

    Petite question stupide… avec laquelle nos cours d’allemand sont si intéressants. Comment fait-on pour étudier les fameux cas (N,A,D et G) si on ne sait pas différencier le coi du cod?

    ABE salut, ayez un peu d’indulgence avec cette personne qui se perd dans une secte asiatique pour se retrouver quelques années plus tard conseiller national d’un parti qui ne représente que 30% d’un électorat qui se borgne à ne regarder que son nombril.
    70% des Suisses ne partagent pas leurs idées.

  6. Abricot du ValaisNo Gravatar dit :

    M. Yves Nidegger a raison. La Suisse doit devenir neutre, indépendante et produisant une économie libérale favorisant la création des entrepreneurs, économie opposée au collectivisme de nos voisins européens taxateurs. Un pays des hautes valeurs morales qui pourrait se chercher des partenaires comme la Russie ou les USA. Ce n’est qu’en respectant nos traditions et nos valeurs que les autres nous respecteront. Les ravages du constructivisme, du relativisme doivent être effacés également.

  7. BrigitteNo Gravatar dit :

    Quelque chose est pourri dans l’abricot du Valais. Faut dire. Pas tout compris. Surement un ravage du constructivisme. A moins que relativisme…