Le non de la gauche
Comme promis dans un commentaire précédent, nous rapportons ici (sans mise en forme) les arguments pour le non le 8 février prochain d’une partie de la gauche. Comme vous pourrez le constater, le texte ci-dessous est dénué de sarcasme et d’humour et n’est donc pas le fruit d’un de nos rédacteurs habituels. Nous déclinons donc toute responsabilité, poils au nez.
Les modérateurs, administrateurs et brillants gestionnaires du blog
Comité ouvrier pour le NON à la libre exploitation des personnes (8 pages)
http://www.ucpo.ch/ARCHIVES/6eme%20rencontre/docs%20fr/Argumentaire_libre_circulation.pdf
Et quelques arguments résumés :
Votation sur la libre-circulation des personnes, « libre exploitation des travailleurs »
Accord bilatéraux : Intimement liés à la politique européenne.
Politique européenne de libre circulation des services et d’interdiction d’entraves au marché et au commerce.
4 arrêts de Cour européenne de justice qui invalident des lois et droits de protection du travail et des droits syndicaux.
– Rüffert : droit régional des marchés publics demandant des salaires identiques à ceux des CCT régionaux.
– Luxembourg : droit national sur les travailleurs détachés. Salaires locaux.
– Laval et Viking Line : droit et pouvoir de syndicats à contraindre des entreprises à respecter des CCT.
Les peuples ne sont pas consultés sur cette politique. Et quand ils le sont, ils s’y opposent. Quand la gauche ne se crispe pas sur des dogmes elle gagne dans le camp du non. (France-Irlande).
En Suisse de plus en plus de syndicalistes, de sections et d’élus PS et de partis de gauche osent dire leur non. Qui en plus de dénoncer des mesures d’accompagnements bidons disent :
Non à la politique néo-libérale de l’UE.
Non à la politique du CF qui s’aligne sur l’UE pour changer sa législation (marchés publics, marché intérieur)
Non aux conditions de travail des travailleurs étrangers qui sont expédiés à des milliers de km, dans des conditions indignes.
Constat actuel des mesures d’accompagnements
Le constat que les mesures d’accompagnements sont inefficaces et inapplicables est largement partagé. Celui de la sous-enchère salariale et du dumping aussi.
Le Seco annonce 26 % d’abus et d’infractions dans les secteurs pourtant soumis à aux CCT étendues.
J-C Rennwald et l’USS, qui sont pourtant favorables à l’ouverture des frontières dénoncent :
– dans certaines branches 1 entre prise sur 4 verse des salaires trop bas.
– environ 10% des contrôles démontrent des infractions.
– 20% des amendes restent impayées
– 10% des personnes qui se disent indépendants sont des faux indépendants
– Dans l’Arc jurassien les salaires d’embauche dans l’horlogerie ont baissé de 5%.
Au canton de Vaud, on a contrôlé 5% des travailleurs détachés et 80% étaient en infraction.
L’Etat de Genève a mandaté une étude dont il ressort qu’à Genève que 80 % des commissions paritaires n’effectuent aucun contrôle. Que les sanctions ne sont que rarement appliquées, que selon les branches jusqu’à 20% des travailleurs sont victimes de sous-enchères salariales.
En Valais ce n’est pas mieux. Le CE Burgener dit :
J’ai été effrayé par le grand nombre de violation qu’ont révélé nos contrôles. En 2007 sur 175 enquêtes nous avons trouvé des violations dans 68 % des cas. Des irrégularités qui touchent prioritairement des entreprises étrangères de plus en plus nombreuses à venir travailler en Valais. Thomas Burgener reconnait aussi que c’est difficile d’encaisser les amendes à ces entreprises.
Et enfin le bureau de métier valaisan dénonce également l’insuffisance des mesures d’accompagnements. Je cite son directeur Gabriel Décaillet : le régime des sanctions prévu par la Loi sur les travailleurs détachés n’est pas suffisant. Existe-t-il une réelle volonté politique d’aider les entreprises locales à lutter à armes égales avec les entreprises étrangères.»
Bulgarie Roumanie
Nous sommes opposés à la libre circulation des personnes en général. Nous l’étions déjà en 2005 pour la Pologne. C’est clair que plus le niveau de vie et des salaires est bas dans un pays plus la pression est forte sur le marché du travail.
Mais nous sommes opposés à la libre circulation des personnes tant que la politique Européenne se batit sur la libre exploitation des travailleurs et sur le démantèlement des acquis sociaux.
Si refus
Notre non se base sur 2 aspects
– les mesures d’accompagnements
-et sur un non à la politique européenne. Cette politique, en particulier la libre circulation des services et celle de la directive sur le temps de travail qui permet des semaines de travail pouvant aller jusqu’à 65 h
-4 arrêts de la CEJ
Après le non des français et des irlandais : Signal fort de la Suisse à cette opposition.
janvier 24th, 2009 à 19 h 16 min
Si j’ai bien compris, votre unique argument est que les mesures d’accompagnements seraient inefficaces. Est-ce suffisant pour refuser et entrer dans une phase de coopération avec l’UE des plus houleuses ? N’y a-t-il pas moyen de renforcer ces mesures d’accompagnements plutôt que de jouer aux apprentis sorciers en refusant l’extension ?
janvier 25th, 2009 à 18 h 51 min
Note: je ne représente ni la gauche, ni le comité du NON, ni la GVA ni qui que ce soit. J’ai simplement amené sur la table le fait qu’il y a un non qui n’est pas motivé par des raisons xénophobes.
Par rapport à la question de Fernand, où voit-il qu’il y a un unique argument ? Même dans les arguments résumés ci-dessus on voit qu’il y en a un deuxième, et de taille.
A titre personnel j’ai voté non pour modestement torpiller un projet européen qui heurte mes convictions anarchistes et anticapitalistes. Si ça ne tenait qu’à moi il n’y aurait plus d’états ni de frontières.
janvier 26th, 2009 à 12 h 49 min
Ah ouais, pis le meilleur moyen d’y parvenir consiste à fermer les frontières. Bien vu.
janvier 26th, 2009 à 14 h 11 min
Le gros problème de cet argumentaire, c’est qu’il ne propose qu’un NON, et n’offre ni perspective alternative, ni projet d’action. Si les mesures d’accompagnement sont inefficaces pour éviter le dumping salarial (ce que je crois), il faut proposer des mesures qui le soient, ainsi qu’un projet pour les mettre en place.
Pour les mesures plus efficaces, j’en vois trois: 1. les représentants syndicaux dans les entreprises devraient bénéficier d’une protection renforcée contre le licenciement. Cela leur permettrait de dénoncer les cas de dumping plus efficacement que les 150 inspecteurs, faciliterait la création de comités d’entreprise syndicaux là où il n’y en a pas, puis la création ou le renforcement des CCT; 2. le contenu des contrats d’embauche devrait être disponible facilement par le net, ce qui faciliterait grandement les contrôles; 3. la création d’un salaire minimal dans chaque branche d’activité.
Pour leur mise en place, il faut définir plus précisément l’utilité du NON. Ce dernier ne doit pas être seulement un refus de la «libre-exploitation des travailleurs», comme vous dites. Mais doit représenter la demande d’une renégociation de ces accords entre patrons et syndicats pour renforcer les mesures d’accompagnement, avant de les accepter. Vu que l’économie suisse a un besoin impératif de ces accords, c’est une occasion unique pour les syndicats et les travailleurs de ce pays (qu’ils soient Suisses ou étrangers) d’obtenir des acquis sociaux. Sans cela, le rapport de force ne sera pas en leur faveur et ils n’obtiendront rien, à moins de faire des grèves sur le long terme ce qui –et c’est le moins qu’on puisse dire– n’est pas une tradition helvétique.
janvier 26th, 2009 à 14 h 36 min
Comment faisait la Suisse pour faire du commerce avec la France, l’Allemagne et bien d’autres pays avant les accords bilatéraux avec l’UE ? Comment est-ce que les italiens ont fait pour venir ? Comment font les indiens, américains et australien avec qui nous n’avons pas d’accords ?
La fin des accords ne signife pas qu’on doive cesser de faire du commerce, elle ne signifie pas qu’on doive renvoyer tous les étrangers qui travaillent actuellement sur le territoire. Ca ce sont les menaces fallacieuses des milieux économiques et politiques.
Le gros problème des accords bilatéraux est qu’ils sont devenus un vrai PIEGE: nous ne pouvons plus rien refuser de ce qui provient de l’UE sous peine de voir s’effondrer l’ensemble du domino et la punition divine de l’UE sera terrrrrrible.
Donc plus le système se complexifie, plus il devient difficile à un moment donné de dire non.
Pour répondre plus précisemment à Croquignol, j’aimerais démonter l’argumentation utilisée:
« Si A est mauvais, alors l’argument contre A ne vaut rien si on ne propose pas une alternative B »
C’est comme si on continuait à utiliser l’amiante sous prétexte qu’il n’y a pas mieux.
On a le droit de dire non à quelque chose même si on a rien de mieux à proposer, on peut toujours revenir à la position précédente.
Je ne dis pas que les propositions de Croquignol ne sont pas bonnes, elles me paraissent même intéressantes et sensée, mais il y a juste un problème: on ne va pas voter sur les mesures d’accompagnement, le salaire minimum (ça c’est pour bientôt) ou d’autres détails; on va voter sur la prolongation et l’extension des accords bilatéraux et on ne sait pas quand on aura la prochaine occasion.
janvier 26th, 2009 à 17 h 54 min
Si, si, le 8 février prochain, nous votons sur l’extension de la libre circulation pour deux nouveaux pays; sur la reconduction du précédent accord fait avec l’UE; mais aussi sur la reconduction des mesures d’accompagnement proposées par le Conseil des Etats et National en 2005. C’est d’ailleurs un argument du OUI: en cas de NON, plus de mesures d’accompagnement.
Ce qui est faux, vu l’impératif besoin du monde économique pour ces accords, il aurait accepté des propositions plus progressives. Mais pour cela, il fallait au moins les mettre en avant.