L’Europe aide-t’elle la Grèce ou sauve-t’elle à nouveau les banques?

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«Les Grecs ont vécu au-dessus de leur moyen et ils doivent maintenant se serrer la ceinture». C’est le genre de phrase que l’on voit souvent dans la presse ces derniers temps. On peut parier que ces prochains mois, on remplacera le mot «Grecs» par «Espagnols», «Portugais», «Italiens», «Irlandais»,…
Alors, pour faire plaisir à Uli, en bon extrême-gauchiste polymorphe que je suis, j’ai envie de crier: c’est de la propagande néolibérale!!! Mais plus sérieusement, c’est peut-être une bonne chose de revenir sur l’origine de la dette publique et de se poser une question essentielle: qui possède cette dette?

Les dettes d’un Etat n’ont rien à voir avec celles d’un ménage, contrairement à ce qui se dit souvent. Car à l’inverse d’un ménage, l’Etat possède un avantage extraordinaire: celui de pouvoir fixer ses recettes, son salaire en quelque sorte, au moyen de l’impôt. Il se trouve que depuis début 80, la majorité des Etats ont entamé une politique de défiscalisation des ménages les plus riches et des entreprises. Pour le justifier, ils mettent en pratique une théorie libérale qui peut se résumer ainsi: si l’on baisse les impôts des 20% les plus riches, ils injecteront leur surplus de fric dans l’économie, créant de la croissance, ce qui finira par profiter à l’ensemble de la population.
Mais de fait, ils placent leur fric en Bourse. Et aujourd’hui, des trois milles milliards de dollars qui circulent sur les marchés financiers chaque jour dans le monde, seul 2% servent au commerce mondial ou à l’investissement productif. Les 98% restant sont utilisés pour des opérations spéculatives.

En même temps, les Etats doivent continuer à assurer des services publics avec moins d’argent. Ils compensent ce manque de fonds publics grâce à l’emprunt (en émettant des obligations). C’est la source des dettes publiques.
Or, si l’Etat emprunte, c’est qu’il y a forcément quelqu’un qui prête. Et ce sont justement ces mêmes contribuables bénéficiant des cadeaux fiscaux, qui lui avancent cet argent (via les fonds de placement, fonds de pensions, banques, assurances,…). En contrepartie, l’Etat doit leur payer un intérêt. Du coup, on en est venu à cette situation absurde: les moins riches payent cet intérêt par le biais de leurs impôts, au bénéfice des plus riches qui sont mal imposés.

La crise de 2008 n’a évidemment pas arrangé les choses. Sur ce sujet, un autre point intéressant mérite d’être souligné. Le journal économique italien Il Sole 24 Ore, que l’on peut difficilement traiter de gauchiste, expliquait vendredi 7 mai que: «Quand la crise, provoquée par le Krach de Lehman [en septembre 2008], a obligé les Etats à intervenir […] les conséquences furent inévitables: les dettes publiques ont commencé à croître et les gouvernements ont dû émettre toujours plus de titres d’Etat [d’obligations]. Et qui les a achetés? Les mêmes banques sauvées par l’Etat.» En gros, les banques ont reçu du fric de l’Etat à un taux d’intérêt ridicule, qu’elles se sont empressées de lui reprêter à un taux supérieur. Bonjour, l’arnaque.

S’ajoute ce qui s’est déroulé le 7 mai dernier. Des spéculateurs ont acheté en masse des Credit Default Swap (CDS): un titre fort sympathique. Ce sont des assurances qui permettent de toucher du fric si une obligation ne rapporte pas ce qu’elle devrait; comme lorsqu’un pays est dans l’incapacité de payer les intérêts de sa dette. L’amusant, c’est que celui qui a un CDS ne possède pas forcément l’obligation qui lui correspond. Pour simplifier, c’est un peu comme si on prenait une assurance sur une maison qui ne nous appartient pas, en ayant intérêt à tout faire pour qu’elle brûle.
Et c’est ce que les spéculateurs ont fait le 7 mai en achetant un max de CDS sur les obligations de la Grèce; en pariant sur son incapacité à payer. Cela provoqua la panique chez les banques européennes qui détenaient ces obligations, et elles cherchèrent toutes en même temps à les vendre sans y arriver, créant ainsi l’écroulement de leur valeur. De son côté, bien sûr, celle des CDS s’envola. Au final, des banques étaient en danger: elles avaient des tonnes d’obligations ne valant plus grand chose (comme les subprime de 2008) et un nouveau Krach risquait de survenir.

La réaction politique de l’Europe fut rapide. Le jour suivant, elle promit un «plan de sauvetage» pour la Grèce et les autres pays en difficulté. Il fallait impérativement qu’ils puissent payer les intérêts de leur dette et/ou la rembourser. Mais, vous l’aurez compris, ce ne sont pas ces pays que l’on sauve; de fait ce sont à nouveau les banques.
En contrepartie, Grèce et Espagne (et bientôt d’autres pays) doivent imposer des mesures d’austérité, c’est-à-dire diminuer les dépenses publiques. Pour résumer, en ce moment, on dit aux travailleurs grecs ou espagnols: il faut maintenant vous serrer la ceinture pour sauver les banques. On peut alors mieux comprendre leur réaction de colère. Et surtout, voir l’intérêt à ne pas reparler de nouveau de sauvetage des banques, vis-à-vis de l’opinion publique.

Croquignol

3 commentaires pour “L’Europe aide-t’elle la Grèce ou sauve-t’elle à nouveau les banques?”

  1. FernandNo Gravatar dit :

    Lu dans « Le Parisien » d’avant-hier :

    « Goldman Sachs a ainsi tiré au 1er trimestre 2010 80% de ses revenus de ses activités de marchés, le reste provenant de celles de banque d’investissement ou de gestion de fortune. »
    C’est tout simplement hallucinant…

    Sinon, on retrouve un article intéressant par là :

    http://www.gestionsuisse.com/2010/old-article-947/

    ou là en général :
    http://www.gestionsuisse.com

  2. gaelNo Gravatar dit :

    Cela devait bien finir par arriver, quand un organisme censé assurer la viabilité d’un pays est entre les mains de personnes vénales et sans scrupules il ne peut malheureusement pas y avoir d’autres alternatives.

    2008 n’était pas le premier crash, et surement pas le dernier, l’histoire nous montre que les banquiers n’apprennent pas de leurs erreurs, ou que dans le meilleur des cas ils s’en foutent.

    A force d’être perpétuellement considéré comme une vache à lait je trouve personnellement normal que le peuple descende dans la rue et remplisse de pavés les vitrines des grandes banques.

  3. David CABASNo Gravatar dit :

    Connaissez vous la loi Giscard Pompidou et le Traité de Maastrich ?

    Alors que les bourses chutent, que l’Euro est à l’agonie, que les plans d’austérités se multiplie à travers l’Europe, il serait sage de connaître les vrais raisons de l’augmentation de la dette !

    Le bon sens commun voudrait que la dette soit due à trop de sociale, trop de santé, trop de services publiques, trop de fonctionnaires, trop de retraites. Nos responsables politique se font l’écho d’un tel message et mettent en œuvre des plans sensés répondre aux problèmes de la dette !

    Mais tout ceci est une arnaque : L’arnaque de la dette !

    Jusqu’au 3 janvier 1973, la Banque de France avait le droit d’émettre du crédit à très bas taux d’intérêt afin de financer les besoins de l’état et d’investir dans les projets d’avenir !

    Mais sous prétexte d’inflation, le gouvernent Giscard Pompidou a cru bon d’empêcher la Banque de France de faire son travail en transférant de fait le pouvoir aux banques privés. Et oui depuis cette époque la France s’endette auprès des marchés financiers avec des taux d’intérêts élevés et c’est obligatoire pour tous les pays membres depuis Maastrich et les traités suivants!

    En claire, ce sont les taux d’intérêts imposés sur la dette qui créer l’augmentation folle des dette publique !

    L’alternative

    Un retour au crédit publique productive, redonner le pouvoir au nation de battre monnaie afin de l’investir non dans les bulles spéculatives ou dans les jeux des casinos financiers mais bien dans l’économie physique au service de la population et du travail humain.

    Nous devons dire Non au chantage de l’empire de la finance de la City de Londres et de Wall Street à New York

    Si tu veux rejoindre la bataille pour changer le système économique rejoins moi sur mon groupe : http://www.facebook.com/group.php?gid=104166076293247&ref=ts

    David CABAS
    david.cabas.over-blog.fr