Rien ne va plus

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Il fut un temps où le principal argument de la droite économique pour faire la promotion du 2e pilier était son insensibilité à l’allongement de l’espérance de vie; contrairement à l’AVS. Pour elle, l’AVS étant basée sur la répartition, les travailleurs paieraient de plus en plus de rentes pour des retraités de plus en plus nombreux. Alors qu’avec le 2e pilier basé sur la capitalisation, il suffisait de placer une part de leur salaire en bourse pour qu’ils vivent à leur retraite avec les bénéfices réalisés.
Et là, tout à coup, la droite remarque que le vieillissement de la population touche aussi le 2e pilier; et qu’il faut baisser le taux de conversion (les rentes) pour assurer son avenir.
Comme l’écrit Le Nouvelliste de mercredi qui présente leurs arguments: «Maintenir le taux à 6,8% entraînerait un manque de financement de 600 millions par an, qu’il faudrait puiser dans la fortune du 2e pilier. Autrement dit, les actifs paieraient pour les retraités.» Et comme le dit le tract du Comité valaisan «pour des rentes sûres et équitables»: «Les rentes ne sont plus adaptées à cette évolution [de l’espérance de vie…]. Il manque ainsi chaque année 600 millions de francs dans les caisses de pension».
En plus de ne pas savoir d’où ils sortent ce chiffre, vous aurez remarqué que d’un texte à l’autre, on est passé du conditionnel à un présent affirmatif. Une question: qui se fout de notre gueule? Le journaliste ou les membres du Comité (Darbellay, Germanier, Fournier & Cie). Je crois que la réponse n’est pas trop difficile à trouver.

Ce qui ne veut pas dire que tout va bien, au contraire. Mais les problèmes du 2e pilier sont plus dus à des raisons économiques que démographiques. Je pense bien sûr à la récente crise boursière, mais aussi à plus long terme. Concernant la crise, il serait intéressant de disposer des chiffres des pertes du 2e pilier. Mais quel dommage! Ceux de l’OFAS (Office fédéral des assurances sociales) s’arrêtent étonnamment en 2007; alors que pour l’AVS, on a déjà les chiffres de 2008. Heureusement, une étude de Swisscanto (Les caisses de pension suisse 2009) permet de nous faire une idée.
Les caisses de pension analysées par l’étude ont en main le 60% de la fortune totale du 2e pilier (p. 35). C’est donc assez représentatif. Selon Swisscanto, en 2008, elles ont perdu dans leur placement boursier entre 11,6% et 13,5% de valeur en capitaux (p. 41) suivant leur ordre de grandeur. Or la fortune totale du 2e pilier en 2007 était estimée par l’OFAS à 625,2 milliards. Du coup, les pertes se compteraient en dizaine de milliards. Comparé aux minables centaines de millions qui seraient causés, selon la droite, par le vieillissement de la population: ça rigole moins.
Bon, on va me dire que l’année boursière 2007 était exceptionnelle; du coup les pertes de 2008 sont plus prononcées. Le problème, c’est que la même analyse est fournie sur 5 et 8 ans. Sur 5 ans, les gains se situent entre 1,6% et 2,1%; sur 8 ans entre 0,7% et 1,1%! En gros, les caisses n’ont pratiquement pas réalisé de gain en capitaux sur ces périodes. Tout en devant assurer des rentes au taux d’intérêt minimum entre 2,25% et 3%, et d’autres dépenses (36,65 milliards en 2007, par exemple).

Du coup, les attaques sur les rentes sont compréhensibles: les caisses de pension sont des entreprises privées qui veulent se faire du fric; et vu que la bourse ne rapporte pratiquement rien, il faut bien se rattraper quelque part…
De plus, après cette votation, on pourrait croire que les caisses et leurs représentants politiques s’arrêteront là. Mais à terme, il ne m’étonnerait pas qu’ils visent la suppression des deux mécanismes qui sont censés assurer un montant minimum pour les futures rentes du 2e pilier (taux d’intérêt minimum et taux de conversion). Et qu’un jour, si la votation passe, ces rentes soient juste calculées en fonction des rendements des placements, sans aucune garantie.
Bien sûr, si le pire de la crise est derrière nous, si la reprise est vigoureuse et dure très très très longtemps; ben, dans ce cas, pas besoin de s’inquiéter, ni de remettre en question le fonctionnement du 2e pilier. Du moins, jusqu’à la prochaine crise…
Ah, au fait, les fluctuations de la bourse ne touchent pas un système basé sur la répartition. Tout va bien pour l’AVS donc. Et non, malheureusement une partie de ses fonds ont également été capitalisés.

Croquignol, en manque de sujets qui prêtent à rire

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