Jean-François m’écrit

C’est avec un brin de retard que j’ai traité, la semaine dernière, l’abondant courrier du mois d’août. Quelle ne fut pas ma surprise de trouver parmi les lettres d’insultes et le nombreux courrier de l’office des poursuites, entre deux pubs, une missive estampillée du sceau du Nouvelliste personnellement à moi propre adressée. J’arrache fébrilement les scellés avec mes dents pour découvrir, ébloui, qu’elle est signée par JFF lui-même, le chef en chef de l’aréopage à la tête dudit journal. Je me sens comme cette femme en bleu, magnifique, de Vermeer, découvrant à la lueur froide  du petit matin, après les premières nausées, la prose martiale et sans tendresse de son homme parti au combat.

Et que me dit-il, ce cher homme. Et bien, je cite:

« Madame, Monsieur, »

Ben en voilà un ton singulier. On ne se tutoie plus? C’est fini? plus de grandes tapes sympathiques et viriles dans le dos? Plus d’éclats de rires énormes et complices aux heures tardives de nos interminables nuits d’ivresse qui font se lever nuitamment la voisine en tenue légère pour prévenir d’un coup de téléphone opportun, civique et salutaire la maréchaussée avinée et embrumée? Soit, j’en prends bonne note. J’opterais cependant et si tu n’y vois pas trop d’inconvénient pour « Monsieur ». Non que le « Madame » me dérange, heurte ou choque ma virilité, triomphante mais ça m’excite et ça pourrait mal se terminer entre nous. Je me connais.

Poursuivons:

« Nous sommes heureux de pouvoir vous compter parmi nos abonnés et vous remercions de votre fidélité. Nous espérons que la lecture quotidienne du Nouvelliste vous donne entière satisfaction.« 

Les bras m’en tombent. Tu m’aurais menti? Tu ne lis donc pas ce blog avec assiduité et frénésie comme tu me l’avais affirmé il y a peu encore, entre deux verres d’une petite poire rapportée par toi du pays basque, pas mauvaise ma foi. Si tu ne me lis plus, à quoi me sert alors de t’envoyer encore tant de mails enflammés pour te signaler que non seulement Christine Savioz écrit de la merde mais qu’en plus elle le fait avec trois mois de retard? Voire plus. Passons, je suis infiniment triste, déçu, blessé et mon cœur saigne, oui, oui.

« Nous nous permettons de vous faire parvenir la facture correspondant à votre abonnement. Nous vous prions de bien vouloir la régler dans les délais indiqués. »

Quel style! Quelle plume! Ah, si je ne peux que déplorer la teneur purement vénale du propos, force m’est de constater qu’il est tenu avec classe et emphase.  Le mot est clair, la phrase souple, l’idée harmonieusement déroulée. Non, rien à redire. Si ce n’est peut-être qu’avec toute la publicité que nous te faisons depuis presque une  année sur ce blog  nous aurions pu espérer un petit geste de ta part. Et ne va pas minimiser je t’en prie l’impact énorme de nos écrits sur ton lectorat. Je connais personnellement des lecteurs qui s’étaient, on ne sait pour quelles sombres raisons, désabonnés, et qui doivent se rendre, déguisés et munis de fausses moustache et identités, en d’autres lieux de consommation publics afin de pouvoir comprendre de quoi traitent nos brillants écrits. Ce blog fait plus de mal à mon commerce qu’au tien, tiens!

« Vous trouverez également en annexe le traditionnel carnet de bons contenant votre bon pour une petite annonce gratuite ainsi que différents bon cadeaux et bon de réductions réservés exclusivement à nos fidèles abonnés. Nous vous invitons à les garder et à en faire usage le moment venu. »

Que nenni, mon Jean-François. Je m’en vais faire un usage rapide de cette avalanche imprévue de cadeaux exclusifs. Alors, bon pour la petite annonce c’est fait, elle est parue aujourd’hui et on n’est pas peu fiers, Fernand et moi. On l’a rédigée ensemble. Et pour l’abonnement d’essai gratuit d’un mois, je l’ai offert à Jean-Yves Gabbud. Ça lui permettra de se relire une fois.

« Nous nous réjouissons de vous retrouver tout au long de l’année et vous adressons nos cordiales salutations. »

Mais nous aussi, Jean-François, nous aussi.

Boris, abonné

4 commentaires pour “Jean-François m’écrit”

  1. FernandNo Gravatar dit :

    Tu riras moins quand le Mossad investira ton troquet ! Ceci dit, Publicitas passe vraiment n’importe quoi comme annonce, sans rien vérifier…

  2. CretchNo Gravatar dit :

    C’est le numéro à qui?

  3. FernandNo Gravatar dit :

    Ah ah ah. La police secrète ! Bientôt au Goulag !

  4. sardinaluileNo Gravatar dit :

    Attention! Il y a vraisemblablement eu complicité! Et au goulag ils aiment pas du tout – houlala non – les complices…
    Rira bien qui pourra encore rire après ça.